Isabeau De Rouffignac
FRANCE
Instagram @isabeau_de_rouffignac
Isabeau de Rouffignac capture des domaines lointains ou intimes, guidée par une approche cohérente qui tisse un fil conducteur dans l'ensemble de son travail. Leur philosophie consiste à établir des liens avec les autres, à combler le fossé, à investir du temps, à adopter des langages inconnus et, finalement, à s'effacer dans l'arrière-plan. Leur regard reste toujours curieux, ancré dans l'empathie.
Au fur et à mesure que l'artiste approfondit sa pratique artistique, une perspective documentaire émerge progressivement, accompagnée d'une esthétique et d'une plasticité inhérentes. En combinant ces diverses approches de leurs sujets, ils transcendent les catégories prescrites telles que le documentaire ou la photographie visuelle, forgeant un langage distinctif qui transmet un message, qu'il soit environnemental, social, humanitaire ou politique. Telle est l'essence de leur dernier projet au Rajasthan, en Inde, une exploration du monde des travailleurs du marbre qui soulève des questions qui font réfléchir.
- SÉRIE -
Le marbre à tout prix
Le marbre à tout prix
L'Inde est l'un des plus grands exportateurs de marbre au monde. Au Rajasthan, des carrières à ciel ouvert s'étendent à perte de vue, créant de gigantesques escaliers dans un paysage aride où travaillent hommes et machines.Ces dernières années, la demande en marbre n'a fait qu'augmenter, rendant les conditions de travail de plus en plus difficiles et dangereuses.Dans cette série, j'interroge l'univers des marbriers sur leur lieu de travail, à travers des paysages, des portraits, des détails. Les mineurs sont vêtus de leurs vêtements quotidiens blanchis par la poussière de marbre qui s'incruste partout. Souvent, ils ne portent que des sandales. Ils devraient porter des casques, des gants et des chaussures de protection, mais il fait chaud et, surtout, ces équipements de sécurité sont rarement fournis ou leur port n'est pas obligatoire. La moitié des emplois au Rajasthan sont fournis par l'industrie du marbre. Sa présence sous terre a entraîné la disparition d'une partie importante de l'agriculture. Son exploitation assèche les terres et il faut bien vivre de quelque chose. Certains y travaillent, comme leurs parents avant eux. Comment changer de vie quand on ne sait ni lire ni écrire et qu'on ne connaît pas ses droits ? Alors on travaille au jour le jour. Avant l'exploitation du marbre, certains étaient agriculteurs et propriétaires de leurs terres. Ignorant sa valeur réelle, ils l'ont souvent vendue à bas prix et se sont retrouvés à travailler pour celui qui l'avait ainsi acquise. Les conditions de travail sont telles que beaucoup souffrent de déshydratation, de plaies mal soignées et de problèmes d'audition. Surtout, les pathologies respiratoires sont très fréquentes, dont la très dangereuse silicose causée par l'inhalation de particules de poussière de silice qui détruisent les poumons. Elle est incurable. En 2016, une étude estimait qu'un mineur de marbre sur deux souffrirait de silicose ou de silico-tuberculose. Cela représente plus de 800 000 personnes.L'État a mis en place des mesures pour améliorer les conditions de travail et prévenir les risques sanitaires, mais elles restent généralement lettre morte.